Par Daniel Yaw Domelevo, Président du Bureau de lutte contre la criminalité économique et organisée, Comptable et ancien Vérificateur général du Ghana, Membre du Comité d’audit et des finances du Fonds mondial pour l’Afrique de l’Ouest et du Centre
Dans le cadre de son mandat visant à promouvoir un financement durable de la santé et une gouvernance saine, le Bureau des Circonscriptions Africaines (ACB) soutient les efforts déployés par les pays africains pour aligner les financements externes sur leurs systèmes nationaux. La récente réunion de haut niveau consacrée à l’alignement du financement du Fonds mondial sur les Systèmes nationaux de gestion des finances publiques (GFP) marque une nouvelle étape dans la quête commune d’une plus grande redevabilité, efficacité et souveraineté.
Promouvoir l’appropriation et la durabilité
Du 4 au 7 novembre 2025, des hauts responsables gouvernementaux, des partenaires de développement et des dirigeants mondiaux du secteur de la santé se sont réunis à Dakar, Sénégal, pour un dialogue stratégique organisé par le Gouvernement du Sénégal, en collaboration avec le Fonds mondial et Gavi, l’Alliance du vaccin.
Des délégués de 15 pays d’Afrique francophone ont échangé sur les moyens par lesquels les systèmes nationaux de GFP peuvent renforcer la transparence, l’efficience et la durabilité à long terme du financement de la santé.
Ouvrant la rencontre, le Ministre de la Santé et de l’Hygiène publique du Sénégal a appelé à une gestion financière unifiée des ressources nationales et extérieures, soulignant que « chaque franc dépensé doit se traduire par de meilleurs résultats sanitaires pour les citoyens ». Il a insisté sur la nécessité de maximiser la valeur des ressources disponibles et de renforcer la collaboration pour un impact durable.
De son côté, Adda Faye, Directrice financière du Fonds mondial, a souligné l’importance et l’actualité de cette initiative :
« Dans un contexte de raréfaction des ressources des bailleurs et d’attentes accrues des citoyens, les pays ont besoin de systèmes solides et transparents pour gérer efficacement les fonds. La gestion des finances publiques constitue le pont entre durabilité et souveraineté. »
Elle a également mis en avant la collaboration continue entre le Fonds mondial, la Banque mondiale, l’OMS et Gavi pour renforcer les capacités nationales, investir dans les ressources humaines et promouvoir une gestion transparente des fonds publics.
Progrès et enseignements de l’Afrique francophone
Les présentations nationales ont mis en lumière des progrès encourageants dans l’intégration des financements des partenaires au développement dans les budgets et trésoreries nationales, notamment au Bénin, au Burkina Faso, en Côte d’Ivoire, au Mali, à Madagascar, au Tchad et au Togo.
Des réformes telles que la numérisation des dépenses, le renforcement des audits et une meilleure coordination entre les ministères de la santé et des finances contribuent à bâtir des systèmes plus cohérents et résilients.
Malgré les défis persistants , notamment le manque de capacités techniques et la fragmentation des structures de rapportage, les participants ont convenu que les bénéfices à long terme du renforcement des GFP dépassent les risques fiduciaires à court terme. Des systèmes nationaux solides demeurent essentiels pour la redevabilité, l’efficacité et la résilience dans la gestion des investissements en santé.
Points saillants
L’intégration renforce la résilience : l’alignement des fonds domestiques et externes dans un système unique consolide la souveraineté et la cohérence.
L’appropriation nationale garantit la durabilité : le leadership des pays dans les réformes de GFP est la clé de résultats pérennes.
Les institutions de contrôle sont essentielles : les institutions supérieures de contrôle jouent un rôle crucial dans la transparence et la confiance.
La réduction des systèmes parallèles améliore l’efficience : l’harmonisation réduit les coûts et les duplications.
La transparence renforce la confiance : des systèmes de GFP robustes soutiennent la bonne gouvernance et un financement équitable de la santé.
La voie à suivre
Les participants se sont engagés à :
Élaborer des plans d’action nationaux adaptés à la maturité de chaque système de GFP;
Mettre en place des cadres de suivi assortis d’indicateurs mesurables ;
Encourager l’apprentissage par les pairs et la coopération entre pays francophones ;
Assurer un suivi régulier pour maintenir la dynamique et mesurer les progrès accomplis.
Vers la souveraineté sanitaire
Pour les 15 pays participants , dont le Sénégal, le Bénin, le Burkina Faso, le Burundi, le Cameroun, la République centrafricaine, le Tchad, le Congo, la Côte d’Ivoire, la République démocratique du Congo, la Guinée, Madagascar, le Mali, le Niger et le Togo — cette rencontre a réaffirmé un engagement commun :
les investissements extérieurs doivent renforcer, et non contourner, les systèmes nationaux.
Comme l’a conclu Mme Faye :
« Chaque investissement doit contribuer à des systèmes plus solides et plus transparents au service de nos populations. Ensemble, nous pouvons bâtir des systèmes de santé résilients — pour l’Afrique, en Afrique et avec l’Afrique. »
Cette rencontre illustre une vision africaine partagée de souveraineté dans le financement de la santé, fondée sur la confiance, la redevabilité et le partenariat.