Au cours des dernières décennies, les initiatives mondiales pour la santé (IMS) ont contribué de manière significative à la réalisation de progrès remarquables en matière de protection de la vie et d’amélioration du bien-être général des populations partout dans le monde. Elles ont notamment permis de réaliser des progrès considérables dans la lutte contre des maladies spécifiques telles que la polio, le paludisme, la tuberculose et le VIH/sida, mais aussi d’étendre la portée d’interventions sanitaires ciblées telles que les programmes de vaccination.
Reconnaissant la nécessité de revenir sur les grandes réalisations des initiatives mondiales pour la santé et de se projeter dans l’avenir, le projet “Avenir des initiatives mondiales pour la santé” (FGHI) a été mis en place dans le but d’identifier les stratégies susceptibles d’améliorer l’efficacité, l’efficience et l’équité des initiatives mondiales pour la santé. Ces actions ont pour objectif de compléter les efforts déployés en termes de financement national pour le renforcement des systèmes de santé et l’obtention de résultats significatifs en matière de santé, tout en s’alignant sur une approche pilotée par les pays afin de prioriser les initiatives en matière de santé et d’avancer sur la voie de la couverture sanitaire universelle (CSU).
Dans le cadre du processus de consultation, les coprésidents du projet FGHI, le Dr Mercy Mwangangi et le Dr John-Arne Røttingen, ont organisé une réunion des principales parties prenantes représentant les gouvernements responsables de mise en œuvre, les organisations dédiées à la santé, les bailleurs de fonds, les agences multilatérales et la société civile du 4 au 6 octobre 2023 à Wilton Park, au Royaume-Uni, et en collaboration avec ce dernier dans l’optique d’engager un dialogue décisif qui va dans le sens de refaçonner l’avenir des IMS. Le Bureau de la circonscription africaine (BCA) était représenté par Susan Mochache, membre du Conseil d’administration du BCA et membre du Conseil d’administration du Fonds mondial pour la circonscription de l’Afrique de l’Est et australe (AEA).
Dans le contexte de la démographie galopante, de l’évolution de la charge de morbidité, des crises climatiques et de l’impact prolongé de la pandémie de COVID-19, il est de plus en plus clair que le financement de la santé au niveau mondial doit impérativement s’adapter. Ce sentiment d’urgence souligne la nécessité de reconfigurer le paysage du financement de la santé mondiale en l’alignant sur les besoins en constante évolution des soins de santé de l’avenir. Les discussions ont porté sur des questions d’intérêt stratégique pour nos pays, notamment l’appropriation par les pays, l’amélioration de l’efficacité grâce à une planification et à des rapports conjoints, et l’intégration de la nécessité pour les IMS d’assurer la pérennité de leurs interventions dans les pays. Les participants sont parvenus à un consensus sur cinq changements stratégiques qui guideront l’évolution de l’écosystème mondial du financement de la santé après 2030:
1. Renforcer la contribution aux soins de santé primaires
Les IMS entendent apporter une contribution plus substantielle aux soins de santé primaires (SSP) en soutenant la fourniture intégrée de services de santé et des systèmes de santé résilients. Pour y parvenir, il est nécessaire de s’aligner sur des plans nationaux prioritaires de grande qualité qui mettent l’accent sur des soins de santé primaires résilients comme base de la réalisation de la CSU.
2. Intégrer la pérennisation dans l’ensemble des portefeuilles des IMS
L’objectif est d’intégrer la question de la pérennité dans toutes les IMS en révisant les politiques, les modèles de fonctionnement, les méthodes d’octroi de subventions et les mesures d’incitation afin de les aligner sur la viabilité financière et programmatique des interventions. Il s’agit de faciliter une transition progressive du soutien des IMS au fur et à mesure que les pays acquièrent une autonomie économique pour le financement de leurs services de santé intégrés.
3. Maintenir l’accent sur l’équité au niveau des résultats
Les IMS s’emploient activement à remédier aux disparités et à éliminer les obstacles aux services de santé, en particulier dans les régions où les capacités ou l’engagement des pouvoirs publics font défaut. Elles adoptent des approches adaptées et spécifiques à chaque pays en vue d’étendre la portée des systèmes de santé formels, au moyen d’initiatives ciblées conçues pour les populations vulnérables et marginalisées et la promotion de l’égalité des genres.
4. Assurer la cohérence stratégique et opérationnelle
La recherche d’un alignement stratégique et opérationnel est une priorité, et cet effort est rendu plus efficace par des modèles de gouvernance et de fonctionnement incitatifs. Les systèmes et procédures en place sont conçus de manière à minimiser toute charge indue pour les pays concernés.
5. Coordonner les approches concernant les produits, la recherche et le développement, ainsi que la fabrication régionale, afin de remédier aux défaillances du marché et des politiques dans le domaine de la santé mondiale.
Cette approche vise à garantir le développement et la fabrication de produits de santé de haute qualité et adaptés aux besoins. Les IMS recueillent et partagent les avis des utilisateurs afin d’orienter le développement des produits et de fournir des incitations à court terme ou des mesures d’atténuation des risques pour la commercialisation dans le but d’assurer un accès abordable, opportun et durable.
Ces cinq réorientations stratégiques reflètent donc une reconnaissance collective de la nécessité urgente d’adopter une nouvelle approche pour relever les défis en matière de santé à l’échelle mondiale, en veillant à ce que personne ne soit laissé de côté. Au cours du dialogue, les participants ont progressé de manière significative dans l’identification d’actions à court terme pour mettre en œuvre ces réorientations. En particulier, la proposition de mettre en place une équipe opérationnelle conjointe composée du Fonds mondial, de Gavi, du Mécanisme de financement mondial, de la Banque mondiale et de l’Organisation mondiale de la santé. Cette initiative a reçu un soutien massif et a pour objet de rationaliser les opérations et d’améliorer la supervision par les organes directeurs des IMS.
En outre, le dialogue a permis de mettre en exergue le rôle central des conseils d’administration des IMS dans la supervision de la mise en œuvre des engagements, et l’impératif de renforcer la collaboration entre les conseils d’administration. Il a également permis de mettre en évidence la possibilité d’établir un lien avec l’initiative phare de l’Union africaine, la réunion des dirigeants (ALM), en tant que mécanisme régional puissant permettant d’engager les chefs d’État et de gouvernement. En outre, la création d’un accord appelé “Friends of the FGHI” pour stimuler la mise en œuvre et la redevabilité lorsque le projet “avenir des initiatives mondiales pour la santé” arrivera à son terme à la fin de l’année 2023 a suscité de l’enthousiasme.
En s’appuyant sur les discussions perspicaces tenues lors du Dialogue de Wilton Park, il apparaît clairement que la stratégie du BCA qui consiste à apporter un soutien technique aux membres africains au sein des conseils d’administration des IMS est à la fois opportune et fondamentale. Le BCA, en partenariat avec ses collaborateurs, est déterminé à favoriser un dialogue continu entre les pays africains et les parties prenantes sur la manière d’améliorer et de renforcer leur influence collective et leur participation aux IMS et à d’autres discussions et décisions pertinentes en matière de santé mondiale. L’évolution en cours du BCA devrait donc permettre de concrétiser cette vision et, à terme, d’améliorer la coordination régionale, de consolider et d’unifier davantage la voix de l’Afrique au sein des IMS.