Clap de fin de deux jours de réunion qui ont rassemblé 32 délégués issus de 13 pays classés Contexte d’Intervention Difficile (COE en anglais) par le Fonds Mondial. Cette rencontre organisée par le Bureau des Circonscriptions Africaines a été ouverte le 22 juin à Lomé (Togo) par Mme Zoutéhatou Kassah-Traoré, Ministre des Travaux Publics et Présidente de l’Instance de Coordination Nationale (ICN) Togo. Se réjouissant de la tenue de la réunion en terre togolaise, la ministre a rappelé l’importance des pays CID pour le Fonds mondial et pour la circonscription d’Afrique de l’Ouest et du Centre du Fonds mondial. Cette circonscription détient 11 pays sur les 29 pays classés CID dans le monde. A ceux-là, s’ajoutent les deux pays d’Afrique de l’Est et Australe. Au total, 13 pays des circonscriptions africaines sont classés CID. De son avis, au-delà des défis sécuritaires et structurels, tous les pays pourront apprendre et se soutenir les uns les autres.
Cette rencontre avait entre autres pour objectifs (i) d’engager les participants de l’AOC provenant des pays à contextes d’intervention difficile à réfléchir sur les politiques et processus du Fonds mondial qui affectent la mise en œuvre de leurs subventions et à proposer des solutions (session virtuelle), (ii) d’identifier les priorités régionales concernant les contextes d’intervention difficile, dans le but d’influencer les plateformes du Fonds mondial et d’autres institutions de santé mondiale, (iii) de discuter des progrès des pays à contextes d’intervention difficile de l’AOC relativement à la performance des subventions du Fonds mondial pendant le cycle actuel.
Contexte d’intervention difficile, kézako ?
Cette conversation sur les CID a commencé le 15 juin par une session virtuelle durant laquelle M. Francesco Moschetta du département CID du Fonds mondial était revenu sur quelques principes directeurs de la politique de CID. « La politique sur les CID codifie l’engagement du Fonds mondial à « améliorer l’efficacité dans les contextes d’intervention difficile grâce à l’innovation, à une flexibilité accrue et à des partenariats », selon les termes du Cadre stratégique de la Stratégie du Fonds mondial pour la période 2017-2022. Cette Politique est basée sur un travail analytique mené entre 2014 et 2016 et par plusieurs consultations avec des partenaires extérieurs conduites en 2015 et en 2016. De plus, elle s’appuie largement sur l’expérience et les compétences des équipes pays du Fonds mondial.
Les contextes d’intervention difficile désignent des pays ou des régions caractérisés par une gouvernance fragile, un accès insuffisant aux services de santé et des crises d’origine humaine ou naturelle. Cette Politique identifie les pays du portefeuille du Fonds mondial dont le niveau d’indice de risque externe est le plus élevé. La classification dans la catégorie des contextes d’intervention difficiles constitue la première étape pour bénéficier, éventuellement, des modalités et flexibilités décrites dans la Politique mais ne garantit pas automatiquement leur application.
De façon pratique, les investissements du Fonds mondial dans les contextes d’intervention difficile ont pour objectif d’élargir la couverture des services de prévention et de traitement du VIH, de la tuberculose et du paludisme, pour toucher les populations clés et les populations vulnérables, et pour sauver des vies. Ils visent également à améliorer la résilience en renforçant les systèmes communautaires et les systèmes de santé, et à surmonter les obstacles liés au genre et aux droits de l’Homme qui entravent l’accès aux services. Dans les situations d’urgence, la portée des investissements du Fonds mondial pourra être plus limitée et se réduire à assurer la continuité du traitement et des services essentiels pour les personnes touchées par les trois maladies, ainsi qu’à prévenir et contenir les foyers de maladie ».
Actuellement, dans la gouvernance du Fonds mondial, 29 pays dans le monde sont classés CID : l’Afghanistan, le Burkina Faso, le Burundi, la République Centrafricaine, le Tchad, la République Démocratique du Congo, l’Eritrée, la Guinée, la Guinée-Bissau, Haïti, l’Irak, la Corée du Nord, le Liban, le Libéria, le Mali, Myanmar, le Nicaragua, le Niger, le Nigéria, le Pakistan, la Palestine, la Sierra Leone, la Somalie, le Soudan du Sud, le Soudan, la Syrie, l’Ukraine, le Venezuela et le Yémen ; 13 de ces pays se trouvent en Afrique et font partie des circonscriptions de l’AOC et de l’AEA.
Les avantages de la politique CID
Les pays ont partagé les expériences des innovations, flexibilités et partenariat que la politique des CID a permis dans leur pays. Ce partage d’expérience leur a permis d’apprendre ce qui est possible dans le cadre de cette politique pour mieux atteindre les objectifs de sauver des vies.
Le Bureau a promis de rassembler ces informations et de les partager avec tous les pays CID.
Des défis communs
Comme on peut s’y attendre, malgré les spécificités nationales et géographiques, les CID font face à certains problèmes communs vis-à-vis de cette politique du Fonds mondial. Les participants à la réunion ont expliqué que leurs pays sont aussi sous mesures de sauvegarde additionnelles, et la plupart ont aussi des agents fiscaux comme mesure d’atténuation de risques.
Certains participants ont déploré le fait de n’avoir jamais vu les matrices de risques de leur pays qui déterminent en partie ces mesures. Une plus grande connaissance de cette matrice leur permettrait de mieux s’approprier les mesures d’atténuation. Beaucoup n’ont jamais vu non plus les termes de références des agents fiscaux installés pour les subventions et donc ne connaissent ni le champ d’action et la durée de leur mission ; peu ont connaissance d’un plan de sortie ; pour la plupart, aucun plan de sortie n’est défini.
Il faut aussi noter l’atmosphère de franchise durant les discussions où certains participants ont expliqué que dans leur pays avec un indice élevé de corruption, la présence des agents fiscaux du Fonds mondial aide les acteurs de mise en œuvre à résister aux pressions de détournement.
Certains pays peinent à absorber les fonds alloués. En effet, de nombreux pays enregistrent des retards dans le démarrage des activités ; ce retard se traduit par des activités non-effectuées en début de subvention donc une moindre absorption des fonds. Le délai moyen entre la signature de la convention et les premiers décaissements est de six mois, ce qui ralentit la mise en œuvre.
Les participants ont aussi expliqué la longueur et la pénibilité des reprogrammations qui prennent entre quatre et sept mois sur des cycles de 3 ans.
Des solutions existent
Les participants à cette réunion ont proposé des solutions telles que le renforcement des partenariats, une bonne prise en compte des plans nationaux et des actions renforcées pour une optimisation des ressources. En effet, de nombreux pays ont fait état d’interventions en vase clos qui ne consultent pas les initiatives nationales ou de partenaires dont certaines activités sont parfois dupliquées. Par ailleurs, afin de faire face aux ruptures de stock, il a été proposé aux partenaires d’utiliser la logistique des ONG humanitaires pour convoyer les intrants dans des zones difficiles d’accès, spécialement pour ces contextes d’intervention difficile.
Les participants ont demandé au Bureau des circonscriptions africaines de rassembler et de partager les expériences des pays de façon à constituer une base de données dont ils peuvent s’inspirer.
Beaucoup ont également souligné l’utilité de cette réunion et la nécessité de la renouveler pour leur permettre de partager leurs expériences et d’améliorer la mise en œuvre des subventions dans leurs pays respectifs.