Cette réunion a donc servi de prétexte pour examiner en profondeur le rapport consultatif du Bureau de l’Inspecteur Général, afin recueillir les réactions des pays membres de la circonscription.
Le rapport consultatif du BIG dont il est question met en évidence quelques-uns des multiples défis socio-économiques, sécuritaires et politiques, auxquels cette région d’Afrique fait face, compromettant ainsi les performances des subventions du Fonds mondial pour la lutte contre les trois épidémies du VIH, la Tuberculose et le paludisme. A cet égard, on note que 70% des pays de la région enregistrent un faible taux d’utilisation des allocations passées ; du fait de la grande fragilité et instabilité, 18 des 23 pays ont connu des crises majeures au cours de la dernière décennie ; des systèmes de santé de faible résilience avec des ressources humaines trois fois plus faibles que celles du reste de l’Afrique. Le financement de la santé est généralement en déca des engagements d’Abuja d’atteindre 15% des budgets nationaux à cause des espaces fiscaux très étroits ne laissant qu’une marge de manœuvre budgétaire très limitée et un déficit du financement régional de 50% pour les trois maladies, tandis que le Fonds mondial est le plus important bailleur de fonds de la région (55% pour la TB, 45% pour le paludisme et 32% pour le VIH).
Du point de vue des modalités opérationnelles qui pourraient expliquer en partie les faibles performances des programmes, la représentation du Fonds mondial a fait un rappel et la mise à jour sur les politiques, directives et processus du Fonds mondial telles que la Politique de Sauvegarde Additionnelle (PSA) ; la politique de trésorerie sujette à conditions ; l’amélioration de la cohérence régionale et les méthodes de travail dans la région AOC. D’autres considérations ont été également passées en revue telles que l’accès aux services de santé en minimisant les coûts imputés aux utilisateurs des services de santé et la disponibilité des données granulaires. Les fonds mondial a exposé les améliorations envisagées au niveau opérationnel dans le cadre de ces modalités de mise en œuvre des subventions afin de s’assurer que les 6 principes soient intégrés dans la conceptualisation des subventions, dans le cadre du prochain cycle de mise en œuvre : il s’agit précisément : (i) du rôle clé du Ministère de la Santé dans chaque Etat ; (ii) des modalités de mise en œuvre et des liens de rapportage clairs et formalisés entre les différents niveaux ; (iii) du mandat et de la compétence des institutions responsables ; (iv) de l’existence d’un réseau d’acteurs ; (v) de l’approche équilibrée de la gestion des risques ; (vi) et enfin de l’identification des mesures de renforcement des capacités de gestion des subventions dans les plan d’Assistance Technique. Il a en outre précisé que Le Secrétariat collaborera de façon étroite avec les pays pour élaborer des plans d’actions définissant clairement les responsabilités du Fonds mondial, des acteurs pays et des partenaires.
Sur les progrès dans la lutte contre les trois épidémies, même si on note des avancées remarquables accomplies en matière de lutte contre le paludisme et le VIH, ceux-ci restent faibles par rapport aux autres régions d’Afrique. Par ailleurs la région a enregistré des résultats médiocres pour ce qui est de la TB.
Pour ce qui est du paludisme, la région a enregistré une réduction de 31% de décès entre 2016 et 2020, tandis que le taux d’incidence a diminué de 23%, avec une prise en charge des cas de 87% par rapport à la cible et une couverture en moustiquaires imprégnées d’insecticide longue durée (MILDA) de 72% en 2016 représentant 215 millions de personnes au total qui ont accès à des moustiquaires.
Quant au VIH, la région a enregistré une réduction de 27% de décès liés au sida entre 2010 et 2017 et les nouvelles infections ont diminué de 12% au cours de la même période. Cependant, alors que la couverture en traitements antirétroviraux a augmenté de 29,2% au cours de cette période, la région est en retard par rapport au reste de l’Afrique pour toutes les cibles en ce qui concerne la cascade de traitements.
La TB est la composante pour laquelle la région est particulièrement à la traîne. Entre 2010 et 2016, la région a enregistré une augmentation de 5% du nombre de décès dus à la TB, augmentant ainsi sa contribution globale au nombre total de décès dus à la TB de 7% à 9% au cours de la même période. Le taux d’incidence de la TB a augmenté de 10%, tandis que le nombre de perdus de vue a augmenté de 8% depuis 2010.
En termes de priorités pour le futur, les exposés des partenaires techniques et financiers mettent l’accent sur :
• VIH :
– Réduire les écarts et la nécessité d’éliminer la transmission verticale mère-enfant.
– La prévention chez les jeunes femmes dont la prévalence dépasse actuellement 3% dans certains pays d’Afrique comme le Cameroun.
– Lutter contre la stigmatisation et la discrimination des personnes infectées
– Améliorer la qualité des programmes (Seuls les 25% des pays de la région ont un programme adéquat contrairement aux pays de l’Afrique de l’Est qui en est à 40%).
– Renforcer l’utilisation du système de surveillance communautaire tout en l’affinant pour réduire les écarts
– Renforcer les capacités des jeunes pour en faire des forces de changement
– Saisir l’opportunité de la Couverture Santé Universelle (CSU) pour améliorer l’accès et l’utilisation des services de santé.
• La tuberculose :
Les principaux défis auxquels il faut faire face sont essentiellement : la charge de morbidité persistante de la tuberculose et la coïnfections TB/VIH ; la faible couverture du traitement (52% de cas de tuberculose manquée) ; la Tuberculose multirésistante ; le faible financement domestique.
• le paludisme :
La mise à jour a été axée sur trois piliers : (i) Assurer l’accès universel ; (ii) Accélérer les efforts vers l’élimination ; (iii) Transformer la surveillance en intervention. Pour vaincre le paludisme, il faudra une stratégie globale comprenant des mesures de lutte anti vectorielle, de diagnostic et traitement rapides, en particulier au niveau communautaire. Il faudra changer de cap et améliorer l’approche de la lutte contre le paludisme, notamment dans les pays où la maladie pèse le plus lourdement. Des initiatives et approches ciblées pour intensifier les interventions à haut impact sur la voie de l’élimination du paludisme seront de
Une réunion de suivi est prévue en septembre 2019 au cours de laquelle le Fonds mondial présentera son plan d’action pour la région mais aussi et surtout les plans d’actions pays issus de l’évaluation par pays qu’il compte faire.
La réunion s’est terminée par l’adoption de recommandations à l’endroit des partenaires, du Fonds Mondial (Conseil d’Administration et Secrétariat) et des gouvernemets de la sous-région.
CONTRIBUTIONS DES CIRCONSCRIPTIONS AFRICAINES AU REPPORT DU BUREAU DE L’INSPECTEUR GENERAL SUR
La mise en œuvre des subventions en Afrique de l’Ouest et du Centre
Le Bureau de l’Inspecteur Général du Fonds mondial a diffusé les conclusions du rapport consultatif sur la mise en œuvre des subventions dans la région d’Afrique de l’Ouest et du Centre (AOC) lors de la 41e réunion du Conseil d’Administration du Fonds mondial tenue en mai 2019. Cette enquête, menée durant le dernier semestre 2018, fondée sur un examen approfondi des données, des entretiens qualitatifs et des visites sur le terrain, a été réalisée afin de renseigner le Secrétariat sur la nature des obstacles à la mise en œuvre des subventions du Fonds mondial dans la région AOC et la manière d’aborder ces difficultés.
Les pays membres de la région d’Afrique de l’Ouest et du Centre, auxquels se sont jointes diverses parties prenantes, notamment les partenaires techniques et financiers et les organisations de la société civile, se sont réunis à Saly (Sénégal) les 9 et 10 juillet pour réfléchir aux conclusions du rapport et à la manière d’en tirer profit pour mieux mener le combat contre les trois épidémies en Afrique de l’Ouest et du Centre en 2020-2022.
Les délégations ont reconnu les efforts intenses déployés par le Fonds mondial pour soutenir les systèmes de santé et étendre la couverture du traitement aux patients de la région. Néanmoins, il est nécessaire d’intensifier les efforts de coordination des interventions sur le terrain et de renforcer le leadership des pays pour s’attaquer aux problèmes graves tels que le financement domestique et la gestion des subventions, la prévention des nouveaux cas et un meilleur accès au traitement pour tous.
Il est crucial pour le Fonds mondial de capitaliser sur les interventions réussies, et de s’engager dans un assouplissement de certaines politiques, des stratégies et des mécanismes de mise en œuvre et de suivi concrets et efficaces, afin de rationaliser davantage notre réponse aux épidémies dans la région d’AOC.
Principales recommandations
Nous demandons aux chefs d’État de notre région, au Fonds mondial et à tous les partenaires techniques et financiers de prendre d’urgence les mesures qui s’imposent pour rendre leurs investissements plus stratégiques et plus rentables.
Nous souscrivons pleinement aux conclusions et recommandations du BIG et, en outre :
Nous exhortons les gouvernements d’Afrique de l’Ouest et du Centre à :
1. Considérer la santé comme une priorité fondamentale dans les allocations budgétaires, même dans le contexte actuel d’insécurité et de fragilité des pays, conformément à l’engagement d’Abuja de 2001 signé par toutes les parties ;
2. Augmenter en priorité la mobilisation des ressources nationales en utilisant des mécanismes innovants, notamment par le biais de la participation du secteur privé, pour renforcer et élargir les interventions efficaces dans la lutte contre les trois épidémies ;
3. S’assurer que les paiements anticipés et les mécanismes de protection sociale, tels que les régimes d’assurance maladie, sont en place pour minimiser les dépenses à la charge des patients qui sont souvent catastrophiques ;
4. Accroître le leadership de l’État en s’appropriant la gestion des investissements du Fonds mondial et intensifier les efforts de coordination de tous les investissements effectués dans le domaine de la santé, fournis par des sources internationales et nationales ;
5. Assurer le développement de plans intégrés de pré-élimination et/ou d’élimination du paludisme prenant en compte le secteur privé, les acteurs communautaires, les questions de genre et les droits de l’homme, y compris les aspects innovants et efficaces fondés sur des preuves, tels que les approches différenciées, le financement, la numérisation des services et produits de santé, etc. ;
6. Assumer la responsabilité de la mise en œuvre des plans de transformation de la chaîne d’approvisionnement élaborés à partir des audits effectués par le Fonds mondial, étant donné que l’accès aux médicaments essentiels est central pour la réalisation de la CSU ;
7. Améliorer la définition, l’identification des besoins, la coordination, l’évaluation et le leadership national sur l’assistance technique (AT) et tirer parti de l’expertise locale en premier lieu, en veillant notamment à ce que des ressources soient affectées à l’assistance technique ;
8. Assurer la participation de la société civile au processus de mobilisation de ressources nationales supplémentaires et à leur utilisation ;
Nous appelons les partenaires du Fonds mondial à :
9. Prendre toutes les mesures nécessaires pour faire en sorte que les ressources nécessaires soient disponibles dans la région de la WCA, tout en assurant un assouplissement des procédures nécessaire pour améliorer encore la mise en œuvre des programmes et l’absorption ;
10. Identifier les missions d’assistance technique nécessaires pour renforcer les systèmes de santé, afin de remédier à leurs faiblesses de manière prioritaires, dans un effort de planification à long terme et coordonnée ;
11. Renforcer l’appui technique à la décentralisation des soins en renforçant, entre autres options, l’approche de la prestation différenciée des services (DSD) ;
12. Rationaliser la collaboration avec les partenaires de la santé pour s’assurer que les questions telles que la mobilisation des ressources nationales, les RSSH, etc. sont gérées efficacement ;
13. Promouvoir une meilleure coordination et un alignement harmonisé des interventions dans les pays pour faire en sorte que l’appui technique réponde efficacement et à long terme aux besoins des pays (7,9,11).
Nous exhortons le Secrétariat du Fonds mondial à :
14. Prendre toutes les mesures nécessaires pour diffuser les politiques et procédures du Fonds mondial et plus particulièrement pour les environnements d’exploitation difficiles (COE) et leur impact sur les subventions via la distribution d’une note d’information en français sur ces procédures et leur utilisation ;
15. Introduire des éléments de flexibilité dans la politique consacrée aux contextes d’intervention difficiles, afin de simplifier la mise en œuvre des subventions dans ces contextes fragiles et de justifier le non-recours à ces procédures pour les pays pourtant éligibles (responsabilité en matière de GFP) ;
16. Examiner au plus vite les mesures d’atténuation des risques actuellement mises en œuvre dans la région et élaborer des plans de sortie pour les mesures de sauvegarde additionnelles, avec des critères mesurables et un calendrier au début de chaque cycle ;
17. Veiller à ce que des mécanismes soient mis en place pour que les récipiendaires principaux (RP) locaux puissent gérer les subventions à long terme ;
18. Formaliser les visites des équipes pays : ordres du jour, mandat, plans d’action, consensus sur la définition et la mise en œuvre des recommandations, niveau de participation des CCM ;
19. Veiller à ce que les OSC disposent des ressources nécessaires pour jouer leur rôle de contrôle du suivi communautaire systématique et en temps réel ;
20. Impliquer les pays dans l’évaluation des équipes pays du Fonds mondial dans leur performance sur les subventions passées et actuelles afin d’anticiper et de capitaliser sur les bonnes pratiques dans le soutien aux pays ;
21. Renforcer la communication et le partage d’expériences entre les pays pour améliorer l’absorption qualitative et quantitative des ressources du Fonds mondial ;
22. Former les équipes pays du FM sur des sujets tels que le RSS et promouvoir le recrutement d’un plus grand nombre de personnels francophones dans les départements transversaux avec l’obligation pour les RP étrangers de respecter les systèmes ;
Nous demandons au Conseil d’Administration du Fonds mondial :
23. D’inscrire au plus vite à l’ordre du jour des comités une discussion générale sur l’appétence pour le risque et d’apporter les ajustements nécessaires aux mesures d’atténuation des risques afin de garantir un juste équilibre entre les risques fiduciaires et les risques programmatiques ;
24. D’inscrire d’urgence à l’ordre du jour des comités du SC et de l’AFC le suivi des recommandations du rapport du BIG sur la région d’AOC et de veiller à la mise en place d’un plan d’action vérifiable doté d’un calendrier très précis et des mises à jour régulières de l’état de mise en œuvre des recommandations ; et
25. D’intégrer de manière urgente les recommandations du BIG dans les discussions sur les ajustements qualitatifs pour s’assurer qu’elles ne pénalisent plus les pays de la région d’AOC en raison de leurs taux d’absorption qui se révèlent actuellement supérieurs au reste de l’Afrique.
26. Réviser de toute urgence le cadre d’atténuation des risques dans tous les pays concernés par les plans de flexibilité au cours des deux prochaines années ;
27. Renforcer l’appui du Fonds mondial par rapport au renforcement du système de santé ou Système de santé résilient et durable (SSRP) tout en impliquant des stratégies d’intervention communautaire.